NAM SON
Nguyễn Văn Thọ, plus connu sous son nom d’artiste « Nam Sơn », naît à Hanoï en 1890. Si les lettrés de sa famille le sensibilisent jeune au dessin et à la calligraphie, c’est au sein du lycée du protectorat de Hanoï qu’il est initié à l’art occidental. Montrant une certaine prédisposition pour les arts graphiques, Nam Sơn commence sa carrière en côtoyant le monde de la presse et de l’édition, et collabore à l’illustration de nombreux manuels, journaux et revues.
En 1922, il rencontre Victor Tardieu à Hanoï. Diplômé des Écoles des beaux-arts de Lyon et de Paris, et habitué des Salons ainsi que des cercles artistiques français, ce dernier est le titulaire du Prix d’Indochine de 1920. Tardieu travaille alors à la réalisation de la grande fresque commandée pour orner l’amphithéâtre de l’université de Hanoï. Nam Sơn propose de prendre le rôle de modèle pour cette composition d’envergure. Vêtu de différents costumes traditionnels, il incarne ainsi plusieurs des personnages qui sont peints par Victor Tardieu. Cette longue période de pose réunit l’artiste fraîchement débarqué de France et le jeune autochtone. Elle sera à l’origine de liens forts et respectueux entre les deux hommes.
Nam Sơn découvre un monde nouveau en pénétrant dans l’atelier de Victor Tardieu, il profite alors des préceptes du maître qui lui enseigne les bases des techniques occidentales. Quand il ne pose pas, il s’exerce à la peinture à l’huile et expose ses premières toiles en 1923. Ces longs mois sont déterminants, car ils favorisent la prise de conscience par Victor Tardieu du potentiel artistique local. Celui-ci est chargé officiellement de réaliser une analyse détaillée qui recense les formations proposées localement dans le domaine de la création artistique, et les capacités relevées.
L’École des beaux-arts de l’Indochine est créée le 27 octobre 1924 par arrêté du gouverneur général Martial Merlin. Peu avant cette date, ce dernier a pu prendre connaissance du rapport de Tardieu qui l’a convaincu. Il le nomme d’ailleurs directeur de l’établissement. Tardieu se rend à Paris afin d’organiser la rentrée prévue pour septembre 1925. Il est accompagné de Nam Sơn qu’il loge et qu’il dirige vers une formation accélérée aux Beaux-Arts – au sein de l’atelier de Jean-Pierre Laurens – et à l’École des arts décoratifs.
Dès la première rentrée, fin 1925, Nam Sơn est chargé par Tardieu d’enseigner le dessin aux élèves libres (non admis), œuvrant ainsi en tant que moniteur. En effet, son histoire personnelle attachée à l’art traditionnel lui permet d’offrir aux candidats potentiels une transition avant d’intégrer l’École, de surcroît dans leur propre langue. Il obtient des résultats très positifs, récompensés par l’ouverture officielle d’un cours préparatoire le 24 octobre 1927 (par arrêté de M. le Gouverneur général de l’Indochine). Nam Sơn reçoit alors le titre de « professeur technique des arts décoratifs » en charge de ce cours. Nam Sơn publie en 1930 La Peinture chinoise chez Le Van Phuc, éditeur à Hanoï.
Victor Tardieu, très concerné par la promotion des œuvres créées par ses élèves, s’efforce de leur faciliter l’accès aux expositions et Salons en Europe. Nam Sơn profite de cet élan et envoie en 1930 au Salon des artistes français – organisé au Grand Palais à Paris – l’œuvre Sur la rive droite du fleuve Rouge où se vend et s’achète le riz (1928) qui entre alors dans les collections des musées français.
Peu avant l’Exposition coloniale – qui est organisée à Vincennes en 1931 et qui permettra à Tardieu, en charge de la section « Indochine », de promouvoir le travail réalisé au sein de son établissement – Nam Sơn écrit dans un discours ces quelques lignes qui expriment sa reconnaissance envers son maître : « […] je viens, en ma qualité d’aîné, vis-à-vis des élèves de cette Ecole, vous adresser nos souhaits de bon voyage. En effet, j’ai été pendant plusieurs années votre élève, j’ai eu la fortune d’être le premier disciple que vous avez formé sur cette terre d’Annam, avant la création de l’Ecole ; c’est en cette qualité, qu’au nom de tous mes camarades, je tiens à saluer en vous le professeur dévoué, le fondateur de l’Ecole des beaux-arts de l’Indochine, l’ami éclairé des Indochinois […]. » Nam Sơn participe à l’exposition d’art colonial organisée à Rome en 1931 (où il reçoit le diplôme du mérite), puis aux expositions qui se tiennent rue La Boétie au sein de l’Agindo à Paris en 1932 et 1933. En 1932, le travail des élèves de l’École des beaux-arts de l’Indochine est particulièrement récompensé au Salon des artistes français à Paris puisque Lê Phổ, Vũ Cao Đàm, et lui-même, reçoivent une médaille d’argent ; Georges Khánh une médaille de bronze ; et Tô Ngọc Vân et Lê Văn Đệ une mention honorable. Il participe à nouveau au Salon des artistes français en 1933.
La participation de Nam Sơn aux foires et Salons organisés en Indochine au cours des années suivantes est régulière. Il expose ainsi en 1935 et 1936 à Hanoï, à la Sadeai. L’année 1943 est l’occasion d’un voyage au Japon, accompagné de Lương Xuân Nhị et Nguyễn Văn Tỵ, et d’une exposition de leurs travaux à Tokyo. Son travail est également présenté à Hanoï cette année-là au sein du Salon Unique.
En novembre 1945, quand Tô Ngọc Vân – élève diplômé en 1931 – est le premier Vietnamien nommé à la direction de l’École des beaux-arts, Nam Sơn reste fidèle au sein de l’équipe professorale ainsi réorganisée. Il décède en 1973.
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